Abnousse Shalmani : Les éxilés meurent aussi d'amour - Grasset, 2018 - roman
Abnousse Shalmani écrit
ici l’histoire d’une famille iranienne qui, en 1985, a fui l’Iran et les persécutions à l’époque du
Chah Reza Pahlavi car ils étaient
intellectuels et communistes. On
imagine qu’il y a beaucoup de vécu pour l’auteur dans ces témoignages.
L’héroïne Shirin a 9
ans dans la première partie intitulée « An I de l’exil ». Elle vient
d’arriver à Paris avec son père et sa mère et ils sont « accueillis »
par les nombreuses sœurs de la mère. Elle suit les discussions de sa famille
sous le canapé du séjour ou dans le couloir et y apprend tout. Et quelle
famille !!! Ce sont tous des personnages qui répandent le malheur et
vivent dans un climat de haine : des tantes communistes manipulatrices, un
grand-père incestueux, un frère (né à Paris) « le tout petit frère »
ainsi nommé durant tout le récit, surdoué, qui, plus tard, fabriquera des
poisons (quelquefois engendrant de très graves troubles) mais aussi quelques
personnages plus rassurants : une
mère aimante, « possédant le don de rendre beau le laid », Hannah une
voisine, survivante de la Shoah, qui est de bons conseils pour l’enfant puis
l’adulte, un père professeur, effacé, qui ne partage pas les idées de ses
belles sœurs tyranniques mais qui n’a
pas son mot à dire devant la tribu des femmes. Tout ce petit monde forme une
famille « dysfonctionnelle » et fantasque.
On se rend compte des
difficultés d’adaptation des exilés et le poids des traditions, principalement pour
cette enfant : la langue, les habitudes culinaires, les fêtes, l’école,
les amis : tout est compliqué et terriblement angoissant puisqu’on ne
s’occupe pas d’elle ou très peu. On peut penser à cette phrase qu’Atiq Rahimi a
dit à la Grande Librairie la semaine dernière : « Quand on a quitté
ses racines, on est éternellement en errance ».
Dans la partie « An IX de l’exil »,
l’héroïne a 18 ans et cherche tous les moyens pour fuir son milieu. Après
quelques amourettes françaises, elle tombe amoureuse d’Omid, un ami de la
famille érudit qui va lui transmettre la culture française. Elle s’émancipe
avec cet homme énigmatique. Puis elle choisit la liberté pour vivre et lutter
contre la haine et la violence.
Ce livre romanesque
(certains personnages sont caricaturés à l’extrême) est comme un conte oriental
cruel et excessif mais agréable à lire car l’auteur emploie l’humour pour ce
sujet délicat à traiter ce qui en fait un récit « tragi-comique ».
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