lundi 30 mai 2016

Olivier Bourdeaut : En attendant Bojangles (n°1 Mai 2016)


livre en attendant bojangles                  


 Olivier Bourdeaut : En attendant Bojangles - Ed. Finitude, 2016 - roman - grand prix RTL Lire. Prix roman France télévisions. Prix du roman des étudiants France culture.

 

 

 

 Ce premier roman d’Olivier Bourdeaut est « un petit bijou » de drôlerie et de tristesse à la fois, « un formidable hymne à la joie, à l’amour et à la douce folie » » : c’est l’histoire d’une famille un peu givrée.

Un petit garçon, le narrateur, vit avec ses parents un enchantement permanent : Louise, la mère (elle change de prénom tous les matins) est terriblement attachante et extravagante : « elle répand un tourbillon de poésie et d’énergie sur tout » (ELLE). Georges, le père, veut vivre en dehors de toutes conventions. Ils forment un couple passionnément amoureux, vivant soit dans un appartement où l’on fait la fête tous les jours, soit dans un château en Espagne où l’on danse sur « Mr. Bojangles », superbe musique  avec la voix chaude de Nina Simone (à écouter obligatoirement). Quelle vie fantaisiste pour un enfant : le petit garçon contemple sa mère avec une admiration sans bornes. Elle le chérit : « Elle me traitait ni en adulte, ni en enfant mais plutôt comme un personnage de roman » dit-il. Trop touchant !
L’excentricité de ce couple dépasse les bornes et la mère doit se soigner dans un hôpital psychiatrique. Les réflexions de l’enfant sur cet épisode de l’enfermement de sa mère sont extraordinaires de lucidité. Trop émouvant !
Il faut aussi signaler le quatrième « personnage » de ce roman : une grue de Numidie, appelée Madame Superfétatoire : Trop fantasque !
« On rit comme on pleure au rythme de la musique » (Télérama) et au rythme des idées farfelues des parents. Le tout est écrit avec plein d’humour, d’esprit, de poésie.
Je peux conclure avec cette phrase de la revue Lire : « Un conte pour petits et grands qui tout en humour et délicatesse aborde mine de rien le thème de la maladie mentale ».
Bon moment de détente rieuse et sérieuse…

Catherine Poulain : Le grand marin (n°2 Mai 2016)

livre le grand marin 

Catherine Poulain : Le grand marin - Ed. de l'Olivier, 2016 - roman français



Cette histoire extraordinaire que l’on devine autobiographique raconte le destin d’une jeune française, la frêle Lili, qui décide de partir pêcher la morue en Alaska et de passer dix années à Kodiak. On comprend que la baroudeuse-auteur n’en est pas à son premier voyage puisqu’elle fut aussi « modèle aux Beaux-Arts de Singapour, assistante d’un cracheur de feu, barmaid à Hong-Kong, employée d’usine en Islande, ramasseuse de pommes au Canada, peintre sur un chantier naval au Guatemala ». Une sacré voyageuse de 55 ans de nos jours.
Ici donc en Alaska, notre narratrice, ce petit bout de femme que l’équipage surnomme ‘moineau’, «  rejoint la cohorte des  êtres à la dérive, corvéables à merci, mercenaires des mers, qui trainent le long des quais » (La Croix).
La première moitié de ce roman est comme un ouragan. Notre Lili supporte et aime les conditions les plus extrêmes de cette vie sur un bateau de pêche : froid polaire, humidité continuelle, manque de sommeil et de nourriture, brimades et humiliations  de la part des hommes, blessures. MAIS c’est ce qu’elle recherche et elle y trouve la liberté, le moyen de donner un sens à sa vie, en se donnant à fond, en allant au bout de ses forces. Elle trouve « le bonheur de mettre son corps à l’épreuve et en mouvement » (Le Monde). Quelques descriptions du travail à bord sont magnifiques : les poissons à éviscérer en cale dans le sang et la glace par exemple ainsi que les beaux portraits de ces grands marins, tous anciens trappeurs ou bucherons, tous des alcooliques, des costauds comme le « grand marin », Jude, avec qui Lili a une histoire d’amour.
Le roman s’essouffle ensuite : une fois à terre Lili traîne comme tous les marins. L’abus d’alcool, les cigarettes fumées à la file, la nourriture succincte sont le lot de toutes les longues journées. Le tour des bars dont on ne retient pas les noms, le soutien de ses amis marins tous marginaux que l’on a du mal à reconnaître au fil des pages donnent un récit assez confus.
Le tout est quand même d’une belle écriture dans un style « âpre et sec » ainsi qu’est la dureté  de cette aventure. C’est un roman « physique » !!!

Adelle Waldman : La vie amoureuse de Nathaniel P. (n°3 Mai 2016)


  Adelle Waldman : La vie amoureuse de Nathaniel P. - Poche Points, 2014 - roman américain

Nate, jeune Newyorkais à la mode, dans les trente ans, raconte les péripéties de sa vie sentimentale. Il passe d’une femme à l’autre, selon l’humeur : elles sont toutes charmantes, jolies, intelligentes, travaillent dans la presse, c’est-à-dire dans le même milieu littéraire que Nate qui, bien qu’auteur, arrondit ses fins de mois en étant critique littéraire et en écrivant des articles philosophiques. « Il est le produit d’une enfant postféministe des années 1980 et d’un cursus universitaire conventionnel des années 1990 » nous dit l’auteur… »
Cet homme « inconséquent » nous est décrit avec finesse et humour, « d’une façon aussi drôle que juste », dans son intimité et ses gestes de tous les jours. Peut-être est-il beau et attirant, brillant en société mais il a des côtés peu reluisant : c’est un paresseux et un insatisfait, qui ne veut pas s’engager auprès d’une unique personne toute une vie ni renoncer à sa liberté. Ce type entretient « une longue relation intime avec la culpabilité ».
Ces femmes actives, « exigeantes, clairvoyantes, féministes mais aussi amoureuses » avec qui ils partagent sa vie quelques temps sont sans concession pour leur amant et la description de la panoplie de ces femmes est succulente. « Les atermoiements du jeune homme délicieusement répétitifs valent moins pour eux-mêmes que pour ce qu’ils révèlent des femmes qui en sont l’objet… » (La Croix )
Le style est brillant, plein d’humour vachard pour cette étude de mœurs de la vie à New York. C’est un roman « piquant » dit la revue LIRE….

La vie amoureuse de Nathaniel P.