jeudi 19 juin 2014

Audur Ava Olafsdottir :L'Exception

livre l'exception   Audur Ava Olafsdotir : L'exception - 2014,  Ed Zulma - roman étranger traduit de l'islandais.

J’avais particulièrement aimé le BEAU livre de cet auteur, « Rosa Candida », paru pour la rentrée littéraire 2010, dont le héros était passionné de roses et de jardins et était un père plein de tendresse pour sa petite fille. Les sentiments de ce papa étaient analysés avec tant de finesse et de poésie.
Ici dans « L’exception », ce sont les sentiments d’une femme qui seront décrits avec tout autant de subtilité ainsi que « les relations compliquées entre un Homme et une Femme ». Le soir du Nouvel An,  Floki apprend à sa femme, Maria, qu’il la quitte…pour son collègue de travail à l’Institut de Recherche Mathématique, qui, de surcroît, vient de réveillonner avec eux…Pour Maria, quelle consternation, quel chagrin, quelle colère, quelle incompréhension. Ils étaient mariés depuis onze ans, semblant filer le parfait amour, ayant deux jumeaux de 2 ans et demi et elle n’avait rien vu venir. Elle est incrédule, désemparée. Nous assistons à l’enchainement inéluctable des états psychologiques dus à la séparation. Elle essaie de fouiller dans son passé pour retrouver des indices qui auraient pu lui annoncer cette rupture si inattendue. Nous suivons tous ses états d'âme décrits avec tant de délicatesse.
Bien heureusement sa voisine, Perla, naine, psychologue, écrivain, nègre pour un auteur de polars et conseillère conjugale, la soutient, la fait réfléchir, fait des commentaires  subtils et plein d’humour sur la situation.
Le tout se passe en Islande et nous entrons dans l’univers quotidien des deux jeunes femmes : les repas, les ballades, le climat, les paysages gris, les journées courtes, le jardin : c’est une vrai étude des mœurs islandaises. « Ce ne sont pas les pâles lueurs de l’hiver boréal qui lui réchaufferont le cœur ». Nous comprenons comment les gestes quotidiens aident à surmonter les probèmes...
Un petit bémol : la fin du livre et sa rencontre avec son ex m'ont un peu troublée....
Ce très beau roman est un « vrai bain de jouvence littéraire. Cette œuvre ressemble à la vie », dit un critique.
 

Jonathan COE : Expo 58

EXPO 58 

Jonathan COE : Expo 58 - 2014,Gallimard - roman étranger traduit de l'anglais.

Dans ses Carnets de route, François Busnel rencontre Jonathan Coe (diffusé le 19/12/2013 sur La 5) dans l’imposante demeure où vécut son grand-père à Newport en Grande-Bretagne puis ils vont sur la tombe de celui-ci. Assis sous un arbre centenaire, l’auteur raconte ce qui l’anime : « Je pense que le rôle de l’écrivain est d’aider le lecteur à penser plus librement pour proposer une alternative à tous les discours qui existent, politiques ou journalistiques ». Pour ce faire, il a choisi de nous embarquer dans une comédie « résolument vintage » et « so british ».
Thomas Foley vit en banlieue londonienne avec sa femme Sylvia et sa mignonne petite fille Gill. Il a une vie tranquille et ordinaire (comme tous les héros de Jonathan Coe). Il est employé au Bureau Central de l’Information où il rédige des brochures.
Sa vie bascule quand on lui propose de partir pour une mission de six mois à Bruxelles à l’Exposition universelle et internationale en 1958. Il sera responsable de la gestion du « Britannia », pub construit pour l’occasion, censé incarner la culture britannique pendant cette Expo 58, dominée par le futuriste Atomium. Ce pub sera l’attraction Numéro 1 du pavillon de la Grande-Bretagne. Il a été choisi, lui explique-t-on, car sa mère est flamande et son père décédé tenait un pub !!!
Notre héros, taiseux, modeste, naïf, beau gosse saute sur l’occasion pour se changer du train-train conjugal et part seul en Belgique. Après quelques anecdotes qui le surprennent, il se retrouve, ravi et heureux dans cette exposition  éphémère aux pavillons factices et joyeux. Ils ne rencontrent que des gens gentils mais bizarres : la belle hôtesse belge Anneke qu’il drague, un rédacteur en chef d’un journal moscovite qui descend les vodkas rapidement, un scientifique anglais qui a mis au point une machine révolutionnaire, une belle américaine qui se dit actrice mais qui est démonstratrice d’aspirateur dans le pavillon américain et deux mystérieux hommes « en trench coat » aux allures de flics qui surgissent à tout moment. Notre héros, manipulé par les uns, baladé par les autres, se retrouve coincé dans une intrigue devenant espion malgré lui. Il ne sait plus quoi penser. Tout ce petit monde cherche qui est l’espion de qui ??? : le russe travaillerait pour le KGB, l’américaine n’est-elle pas agent double ??? et si tout cela était factice ???
« Jonathan Coe déploie sa verve et son humour pour croquer des petites saynètes cocasses », nous dit un critique de la Croix. En effet que de situations loufoques, que de personnages originaux et drôles, que d’énigmes captivantes  jusque la fin…. Son écriture est simple : phrases courtes, dialogues rapides : « J’y tiens, dit-il. Peut-être est-ce pour cette raison que les éditeurs étrangers m’accueillent si bien : mes livres sont faciles à traduire », et l’Express d’ajouter à cette phrase « L’humour anglais est sans frontière ».
Très bon roman de détente « mi-espionnage, mi-sentimental » pendant la lecture duquel on rit et sourit très souvent.


Erik Larson : Les passagers de la foudre.

Hawley Harvey Crippenlivre les passagers de la foudre                                                                                   

Erik Larson : Les passagers de la foudre - Le cherche Midi, 2014 - Documentaire et thriller à la fois traduit de l'anglais



Ce roman est un document historique sur une « invention qui va révolutionner le monde » et en même temps une enquête passionnante sur l’un des plus grands crimes de l’histoire.
Marconi, jeune chercheur italien, invente la « Télégraphie sans fil » en Grande-Bretagne. Ce physicien recevra, avec Braun, le prix Nobel de physique en 1909 « en reconnaissance de ses contributions au développement de la télégraphie  sans fil ». L’auteur nous conte les difficultés de Marconi dans ses expériences laborieuses en nous relatant des documents véridiques. La mise au point de la communication sans fil à travers l’Atlantique est très difficile et jalousé par des collègues malgré les essais d’entente de la part de Marconi. Certains passages sont vraiment longs, particulièrement la mise en place des antennes dans des régions du bout du monde par des temps pourris : tempêtes, pluies, orages etc…
En parallèle, nous suivons la vie du médecin Harvey Crippen qui supporte difficilement l’humeur de sa terrible épouse « une flamboyante chanteuse d’opéra » à Londres en 1910 qui disparaît mystérieusement…Il sera soupçonné du meurtre mais les preuves ne seront trouvées qu’après son départ vers le Canada avec sa maitresse.
Les cent dernières pages de ce roman relatent la course poursuite à travers l’Atlantique : l’inspecteur de Scotland Yard réussit à repérer Crippen et sa maîtresse sur un bateau au milieu de l’océan grâce à l’avis de recherche divulgué dans les journaux et à la perspicacité du capitaine du bateau qui reconnaît à son bord le ménage suspect et les signale à la police grâce à la récente invention extraordinaire de Marconi….Par la presse, le grand public va suivre pour la première fois dans le monde cette poursuite en haute mer. Les télégrammes sont divulgués au fur à  mesure et l’arrestation de Crippen et sa maîtresse se fait à l’arrivée au Québec !!!!
Ce roman est un passionnant document historique et succulente enquête policière très british. On a du mal à croire que les deux histoires sont réelles : thriller très réussi.



Danielle Digne : La petite copiste de Diderot

livre la petite copiste de diderot 

Danielle Digne : la petite copiste de Diderot - 2013, Le passage - roman français .



Dans « Le  Joaillier d’Ispahan », Danielle Digne se passionnait pour un jeune homme, fils d’un riche joaillier, Jean Chardin, qui publia le récit de ses voyages en 1686 : « Voyages en Perse et aux Indes Orientales ». Il révéla l’Iran, donc la Perse, à la fin du 17ème siècle, d’où les « Lettres Persanes » de Montesquieu.
L’auteur aime romancer la vie de personnages ayant existé. Ici elle se plonge dans la vie et la personnalité de Diderot.
C’est une jeune fille campagnarde et orpheline qui, exceptionnellement à l’époque, sait lire et écrire, qui est l’héroïne de ce livre. Elle devient la « petite copiste » de Diderot et nous conte la vie de celui-ci au jour le jour : ses difficultés à écrire les articles  et faire paraître « L’Encyclopédie » (1747 à 1765), ses relations avec les co-auteurs de ce recueil, ses tourments conjugaux, sa liaison clandestine avec Sophie Volland qu’il rencontre en 1755, le rachat « en viager » de sa bibliothèque par Catherine II de Russie ce qui le met à l’abri du besoin jusque sa mort en 1784 et lui permettra de « doter » sa fille. Diderot s’attache à cette jeune fille et apprécie son aide, découvre son intelligence et souhaite en faire « une petite philosophe ». La petite copiste nous décrit un homme difficile mais attachant et nous dépeint la fin du XVIIIème siècle dans la « Société des gens de lettres » qu’elle côtoie. Elle admire ce génie, reconnu pour son érudition et son esprit critique. Il est considéré comme écrivain, philosophe et encyclopédiste français des Lumières, à la fois dramaturge, conteur, essayiste, dialoguiste, critique d’art, critique littéraire et traducteur.
L’idée de faire intervenir la « petite copiste » est très originale et beaucoup d’anecdotes sur la vie de Diderot sont réelles. Les dialogues entre les deux personnages sont parfois simplistes mais donnent beaucoup de vivacité au roman qui est très agréable à lire.