mardi 30 juin 2020

Yoann Barbereau : Dans les geôles de Sibérie (N°1 - Juin 2020)


Dans les geôles de Sibérie

Yoann Barbereau : Dans les geôles de Sibérie - 2020, Stock - essais-documents

 

Ce récit est l’incroyable histoire de l’auteur lui-même, ex-directeur de l’Alliance Française à Irkoutsk. Ce livre effectue une montée en flèche dans les ventes des « essais-documents ».
L’auteur vit en 2014-2015 avec son épouse russe et sa petite fille de 2 ans à Irkoutsk et y travaille, ayant de par son métier beaucoup de relations russes dont le maire de la ville. Le 11 février 2015, il est violement arrêté à son domicile par le FSB (service secret russe qui a succédé au KGB) et est mis en prison avec tortures, violences psychologiques car accusé de « pédophilie sous de fausses allégations ». Il y restera 71 jours (pages superbes de sa relation avec ses co-détenus). Puis il est transféré  en hôpital psychiatrique, puis assigné à résidence.
Après un an de solitude, il décide de s’évader, « s’ensuit une cavale hallucinée vers l’ouest, sorte de voyage de Michel Strogoff à rebours, à l’heure de BlaBlaCar et d’Airbnb » (Express).
A vous de le lire pour savoir la suite.
Ce récit est écrit avec une plume moderne, ironique et pleine de dérision, « digne des meilleurs James Bond » a-t-il été dit.
« Plus qu’un simple témoignage, ce récit est une œuvre littéraire à part entière, également salué par la critique » (LIRE).

Pierre Assouline : Tu seras un homme, mon fils (N°2 - Juin 2020)

Pierre Assouline : Tu seras un homme, mon fils - 2020, Ed. Gallimard - roman 

 Tu seras un homme, mon fils

L’auteur, qui est un passionné de la première partie du XXème siècle et de la Grande Guerre, nous écrit dans ce roman des pages magnifiques sur Rudyard Kipling avec ses romans, ses nouvelles, ses articles, ses lettres, ses discours et ses poèmes. Il réussit à y glisser des passages sur la difficulté d’écrire et de traduire des textes, ici de l’anglais (cette langue si psychologique) au français, particulièrement des poèmes. Puis il nous émeut dans la description de « l’homme, dévasté, le père inconsolable » de la mort de son fils John.
Louis Lambert, jeune professeur de lettres dans un lycée parisien, voudrait traduire à sa manière le poème « IF… », paru en 1910, écrit par Rudyard Kipling, les traductions existantes lui paraissant insatisfaisantes. L’occasion lui est offerte en Mars 1914, de rencontrer à Vernet-les-Bains « l’illustre écrivain », son héros. Il se trouve là avec sa grand-mère qui lui dit en riant qu’il est atteint de « Kiplingite » tant il admire Kipling…
Le contact est difficile, cet homme étant « plus fantaisiste et fantasque que jamais ». C’est « un rebelle épris d’ordre établi ». John réussit quand même à avoir le feu vert de Kipling pour faire cette traduction mettant en valeur « ses qualités de passeur et son goût de la transmission » notés par l’inspecteur de l’académie de son lycée. Sa relation avec le poète devient une certaine amitié : « Jamais je n’oserais me dire un ami » mais comme dit Jules Renard « Il n’y a pas d’amis, juste des moments d’amitié ».  Ses séjours de retrouvailles avec le grand homme de lettres sont sous tension car Kipling a « une sainte horreur des interviews » et se méfie « des biographies cannibales ». Il dit : « La vie d’un écrivain, c’est son œuvre, rien d’autre ».
Notre Louis Lambert réussit quand même à être invité chez Kipling en Angleterre pour « perfectionner en français » le fils John, 17 ans, dont la scolarité n’est pas brillante mais « comme on le destinait aux métiers d’armes », il faut l’éduquer selon la devise de Kipling : « discipline, ordre, devoir». « Comme il est compliqué de devenir le fils de son père ». La guerre éclate et John, malgré une très forte myopie et grâce aux relations de son père germanophobe et militariste, est incorporé dans un bataillon des Irish Guards. « Le problème c’est que le père avait décidé pour le fils » : « Tu seras un homme, mon fils ».
On entame alors la deuxième partie du roman. John est tué en 1915 avec des dizaines de milliers de britanniques et Kipling sera, tout le reste de sa vie, rongé de culpabilité à la recherche de la sépulture de John, son fils qu’il avait envoyé à la guerre, « cet enfant sacrifié ». Comment « ce drame changea à jamais le cours de l’existence d’un des auteurs les plus lus au monde » note l’éditeur de ce livre. Pierre Assouline nous écrit des phrases magnifiques sur le deuil, la résilience, le remord, le chagrin…

Stéphanie Barron : Le jardin blanc (N°3 - Juin 2020)


 


Stéphanie Barron : Le jardin blanc - 2009, 10/18 - roman policier

 

« Et si Virginia Woolf ne s’était pas noyée » : ce titre d’un article de la Voix du Nord m’a tout de suite interpellée, moi qui suis une inconditionnelle de tout ce qui concerne Virginia Woolf, écrivaine anglaise du début du vingtième siècle. L’auteur dit aussi « J’ai imaginé qu’elle aurait pu prendre un train ce jour-là pour rejoindre Vita », son amie et amante, c’est-à-dire le lendemain de son suicide présumé dans la rivière au fond de son jardin à Rodmell dans le Kent., son corps n’ayant été retrouvé que 3 semaines plus tard.
Pas déçue par ce roman policier d’enquête qui se passe au château de Sissinghurst, principalement dans le fameux « Jardin blanc » créé par Vita Sackville-West, la chère amie de Virginia Woolf, donc.
Une jeune paysagiste américaine vient dans ce coin campagnard en 2008 pour étudier le jardin blanc en vue de le reproduire pour un client. A la découverte d’un journal intime dans un abri de jardin probablement écrit par Virginia Woolf  le lendemain de son suicide le 29 mars 1941…., s’emmêlent la vie du grand-père de cette américaine qui a travaillé dans sa jeunesse comme jardinier dans ce jardin, la vie de la responsable de ce jardin qui appartient maintenant au National Trust, la vie d’un spécialiste du département des manuscrits anciens de Sotheby’s, société de ventes aux enchères d’œuvres d’art basée à New York avec une antenne à Londres, la vie du client américain et bien sûr la vie de la paysagiste. Car évidemment le manuscrit sera volé !!!
Très bon roman bien documenté rappelant cette période passionnante de la Grande Bretagne au début du 20ème siècle avec ce mouvement d’artistes originaux de Bloomsbury, de belles descriptions de ce célèbre jardin (visitable encore de nos jours) et de la nature et campagne environnantes, d’intéressantes leçons de jardinage…
Stéphanie Barron est une auteure américaine qui a écrit onze romans policiers mettant en scène l’écrivaine anglaise Jane Austen.