vendredi 19 juin 2015

Léonor de Récondo : Amours (n°3 Juin 2015)

Léonor de Récondo : Amours - Ed Sabine Wespieser, 2015 - roman


livre amours

Léonor de Récondo mène deux carrières : celle d'écrivain avec 4 romans dont Pietra Viva (déjà analysé dans ce blog) qui évoque 6 mois de la vie de Michel Ange et une carrière de violoniste : elle a cofondé en 2005 l'Yriade, un ensemble de musique de chambre baroque. A son passage à la Grande Librairie, elle apparaît comme une jeune femme lumineuse.

Ce roman « Amours » se passe en 1908 en Touraine dans une maison de maître. C'est un huis-clos d'une famille bourgeoise. Victoire, 24 ans, est mariée depuis 5 ans à Anselme, plus âgé, notaire et notable et elle rêve d'attendre un enfant mais elle se refuse à « l'enchevêtrement immonde » qui donnerait un héritier au couple…

Leur vie bascule, le jour où Céleste, 17 ans, qui fait partie du personnel de la maison, tombe enceinte : Que vont décider les patrons de Céleste ? Que va-t-il se passer dans cette maison tranquille. Victoire vivra une révélation étonnante qui « balaie les normes sociales et l'éducation données aux femmes à l'époque ».

L'auteur analyse à merveille la tension qui va se créer entre les trois personnages et qui va les mener dans des situations impossibles. Le caractère fort de la jeune Céleste est magnifiquement senti : comment va réagir cette jeune femme « humiliée, aimée, broyée » qui se console en priant la Vierge Marie avec des phrases qui reviennent comme une incantation. On admire le style et les phrases « bien rythmées, ciselées et pures » et on ne peut oublier que notre auteur est musicienne. Les détails de la vie du début du 20ème siècle sont très précis : paysages, mobiliers et rideaux, robes et corsets, repas et travail en cuisine. Il y a aussi de superbes passages sur Victoire au piano.« Mille détails construisent cette fiction intelligente, sensuelle et bien rythmée » (LIRE)

Ce très beau livre évoque le rapport à la maternité et ses obligations, le rôle du corps des femmes au début du 20ème siècle où une idéologie de la haine du corps faisait ravage et où la société cadenassée insistait sur les différences sociales. : « le corps interdit de plaisir, martyrisé dans des corsets, théorisé par l’Église pour n'être que le réceptacle d'une vie à venir »



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