mercredi 27 mai 2015

Sylvain Tesson : Berezina (n°2 Mai 2015)

Sylvain Tesson : Berezina - Ed Guérin, coll Démarches, 2015 - récit

livre berezina


Sylvain Tesson, aventurier fantasque, décide de suivre les traces de Napoléon deux siècles après le calvaire de la Grande Armée en 1812 « par désir de commémorer la Retraite de Russie » en traversant de Moscou à Paris les grands espaces russes, biélorusses, lituaniens, polonais, allemands, sur un side-car, (« motocyclettes à panier adjacent ») ces motos increvables de marque « Oural », très rustiques mais « fleurons de l'industrie soviétique ».

Il propose à son camarade le photographe Thomas Goisque qui depuis 25 ans photographie le monde pour la presse française et vit à Moscou et à l'écrivain Cédric Gras qui, lui, « aime le silence et a trouvé la Sibérie à la mesure de sa mélancolie » de l'accompagner dans cette aventure. Se joignent à eux deux Russes « génies de la mécanique » Vitaly et Vassili.

Il s'inspire de récits de proches de Napoléon : le journal du capitaine François Bourgogne qui a laissé des Mémoires imagées et naïves et qui, entre autres, « survécut quelques jours en suçant des glaçons de sang »…. et les écrits de Caulaincourt, le grand écuyer de Napoléon.

« Cette aventure est plus sportive qu'un pique-nique en Toscane », nous écrit-il...Nous traversons avec eux dans un froid pénétrant à 80km/h des lieux mythiques : le champ de bataille de la Moskova à Borodino, la Berezina, Vilnius, Varsovie, Berlin…et nous découvrons ces lieux au rythme des étapes. C'est un va et vient entre son périple et ses lectures faites sur la débâcle de Napoléon. Nous suivons les mille et unes aventures pour faire marcher les fameuses machines dans la neige, la boue, le froid, pour se nourrir, se loger, rencontrer les habitants et aussi les mouvements de troupes, les calculs et les tactiques de Napoléon et les ruses des Russes…

Cette déroute de Napoléon fut une « débandade sanglante et désespérée » et ne laissera que 10 000 rescapés sur 450 000 soldats fidèles à leur empereur jusque la mort. Tout en comprenant que l'on critique l'épopée Napoléonienne, dans un interview, l'auteur explique avoir été surpris du peu de commémorations faites en 2012 pour le bicentenaire de la retraite de Russie et pour rendre hommage aux soldats de la Grande Armée...Il nous fait réfléchir à la question de l'héroïsme…

Ce qui est surprenant est que c'est sourire aux lèvres que l'on lit ce récit tant Sylvain Tesson sait écrire avec drôlerie et décrit avec un humour grinçant les scènes les plus atroces dans une écriture précise et fluide et un style original. J'ai particulièrement aimé certaines descriptions : le personnage de Koutouzov, leur dîner chez un français installé à Moscou, pendant lequel ils parlent « russes comme les Européens bien élevés »… la description de son amour pour la Russie, la traversée de petites villes « la petite ville nous paru un congélateur charmant », l'arrivée en Pologne….

Un bon moment de lecture que ce récit d'aventure...

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