Jean-Luc Seigle : Femme à la mobylette - 2017, Flammaion - roman français
Jean-Luc Seigle est décédé le 5 mars 2020 à l’âge de 64 ans. Ecrivain
et dramaturge, il a écrit « une œuvre forte qui a séduit de nombreux
lecteurs en cherchant à s’approcher au plus près de la vérité et de la grandeur
des marginaux, des laissés-pour-contre et des victimes de
l’histoire » : ceci est un communiqué de son éditeur Flammarion.
On peut se souvenir du fameux roman « En vieillissant les
hommes pleurent » et l’émouvant « Je vous écris dans le noir ».
Je n’avais pas jusqu’alors fait de fiche sur ce roman, « Femme
à la mobylette », paru en 2017 et viens de relire ce si beau récit entre
« drame social et fable romantique ». L’auteur nous
« brosse le poignant portrait d’une femme isolée », oubliée de
tous. Reine a trois enfants, vit dans un pavillon délabré ou plutôt survit en
demandant de l’aide pour nourrir ses petits ( son mari l’a quittée pour une
autre du jour au lendemain) et lutte pour que la justice ne lui retire pas ses
enfants. Elle ressasse ces mots : « Tout finit dans l’absence et
le silence absolu du monde ». Elle dégringole et imagine les pires
situations, comme celle que l’on peut soupçonner dans la première partie
troublante intitulée « La nuit impossible ».
Mais deux miracles vont survenir : Reine trouve, dans le
fourbi de son jardin, une mobylette qui va lui permettre de trouver un travail
de « thanatopracteur » (embaumeur de cadavres) qui lui convient car
« elle a le culte des morts et du cimetière ». Second miracle, elle
découvre l’amour fou avec un homme, Jorgen, peintre et routier, qu’elle
rencontre sur une aire de repos de l’autoroute. Les deux miracles lui amèneront
un certain équilibre. L’auteur observe « son héroïne avec une justesse,
une puissance, une délicatesse bouleversante » (LIRE). « Il réussit à
donner à sentir son énergie vitale, le tout avec une écriture nette, rugueuse
et tendue » (Express).
Certains critiques trouvent que ce récit a « la noirceur
et la désespérance des romans russes » comme ceux de Tolstoï que la
grand-mère de notre héroïne lui lisait. D’ailleurs on remarquera que ses
enfants se nomment Sacha, Sonia, Igor. Le dernier chapitre « retour au
réel » avec une fin violente est aussi digne des tragédies russes.
Très beau portrait réaliste de cette femme réagissant
contre son statut d’oubliés de la société, " trop fragile dans un monde féroce".
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