Leïla Slimani : Le pays des autres - 2020, Gallimard - roman français
Leïla Slimani, née en 1981, lauréate du prix Goncourt 2016
avec « Chanson douce », écrit ici le premier tome d’une trilogie sur
son pays natal, le Maroc : « Le pays des autres » : dans ce
récit, « Chacun vit dans le pays de l’autre », a-t-elle dit à La Grande
Librairie, en ajoutant qu’elle s’est inspirée de la vie de ses propres grands
parents. On y retrouve les combats de l’auteur : « Le féminisme, la
libéralité de l’esprit et des mœurs, le dégoût de l’intégrisme et de
l’obscurantisme » (Télérama). Ce premier tome est intitulé « La
guerre, la guerre, la guerre » et se passe entre 1946 et 1956.
En 1944, Mathilde, jeune femme française alsacienne de 20
ans, rencontre en Alsace un jeune
commandant marocain de l’armée française, le ténébreux, Amine. Elle l’épouse,
« fière d’avoir échappé à son destin ». Elle le rejoint au Maroc et
le couple s’installe à 25km de Meknès dans une propriété familiale : Amine
compte exploiter la terre « sèche et rocailleuse » dans le contexte
historique du protectorat des années 1950. Deux enfants arrivent : une
fille Aïcha, sauvage et surdouée, et un garçon, Selim. Les difficultés dans
l’exploitation du terrain et les « brimades coloniales » endurcissent
et assombrissent le caractère d’Amine. Mathilde subit ce changement dans
l’ennui et la solitude, subit « une vie dans laquelle une femme ne dispose
pas d’une once de liberté, une vie dans laquelle une étrangère restera une
étrangère », subit le jugement de tous sur leur couple et le métissage
dont sont issus les enfants. Elle lutte pour exister en tant que Femme et
« avoir des droits dans ce pays où les Hommes sont rois » (Fémina).
On fait connaissance de la mère d’Amine, de sa sœur Selma,
jeune et ravissante qui veut être libre et d’Omar, son frère qui lutte pour
l’indépendance du Maroc. Tous sont extrêmement bien « croqués ».
Le tout se passe dans une nature magnifique : « Les
arbres, la terre mais aussi la chaleur et le vent jouent un rôle central dans
le livre » dit un critique du Monde. L’auteur utilise dans ce récit une
écriture plus narrative que d’habitude avec beaucoup de détails et de
sensations sur la vie quotidienne. On s’attache de ce fait, à son héroïne
Mathilde et sa fille Aïcha dont on lit les gestes, les pensées, « les
élans, les déceptions et les hontes ». L’auteur dit dans une interview à
Paris-Match : « Pendant l’écriture j’étais habitée par des
images, des sensations, des odeurs que je voulais transmettre et qui me
viennent de mon enfance ».
Cette saga familiale d’essence autobiographique est
passionnante et l’on reste sur un questionnement : Mathilde et Amine résisteront-ils ?
Quel avenir auront leurs enfants après l’indépendance du Maroc proclamée en
1956.
A lire donc dans le tome suivant…
Pour la petite histoire, l’auteur se prépare à une
« échappée » : elle a accepté un poste d’enseignante à Harvard
aux Etats-Unis à la rentrée prochaine. Elle part donc avec mari et enfants dans
« un autre pays des autres » dit-elle.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire