Carole Martinez : La terre qui penche - Gallimard, 2015 - roman français
Après le « Coeur
cousu » (2007) avec Solidad, l'andalouse, dont je parlais
récemment dans ce blog, ayant rencontré l'auteur, et « Le
domaine des Murmures » (2011) avec Esclarmonde, emmurée
vivante avec des secrets incroyables, nous voici deux siècles plus
tard, avec Blanche, toujours dans ce même domaine en Franche-Comté
et la rivière enchanteresse de « la Loue » pour un conte
médiéval pour adultes. On
sait que l'auteur aime consacrer ses récits à des héroïnes
féminines.
Nous allons suivre le
destin incroyable de Blanche qui a 12 ans en l'an 1361. Son père
l'emmène, innocente et inconsciente de la vie à venir, avec ses
gardes, dans l'immense forêt inquiétante qui sépare son château
du Domaine des Murmures. Cette fillette, orpheline de mère à l'âge
de un an, « un peu sauvageonne, inquiète et décidée »
pense être sacrifiée au diable et ainsi stopper les guerre, la
peste, la sécheresse ou les pluies torrentielles…
« Comme deux fantômes
qui n'en font qu'un », nous entendons deux voix en alternance :
voix de la petite fille et voix de sa vieille âme errante qui évoque
les souvenirs de sa délicieuse enfance.
Nous rencontrerons des
personnages d'un monde magique et chevaleresque : le père de
Blanche, le beau chevalier qui depuis la mort de sa femme ne pense
qu'aux armes, à la ripaille, aux putains et au diable ; son
futur beau-père, Jehan de Haute-Pierre « ce bon gros
seigneur » ; Aymon, son fiancé que l'on nomme l'Enfant ;
Eloi le beau charpentier et sa force surnaturelle. Entrerons en
scènes aussi tout un monde de fantômes rieurs, d'ogre amateur de
petites filles, de cuisinière de plats magiques, de Dame Verte
représentant la « somptueuse et nonchalante » rivière
La Loue, d'un cheval Bouc magnifique et particulièrement
intelligent, de « loups des sable ». Chacun racontera à
Blanche une partie de l'énigme de sa naissance et de sa vie, ce qui
nous mènera à un dénouement imprévisible...
Difficile de vous
transmettre l'enchantement et l'envoûtement que l'on ressent à la
lecture de ce récit avec un mélange d'écritures : prose
poétique, sensuelle et charnelle (quelque fois un peu crue),
passages de poèmes, quelques dictons d'époque, quelques chansons
dont l'auteur nous explique les origines à la fin du livre dans une
« lettre à mon éditeur ».
Il faut lire et relire
quelques passages de cet univers féérique : la description de
la petite chemise d'un réalisme touchant, celle du vieux jardinier,
celle d'Aymon, « enfant-chien », simple d'esprit avec ses
frasques, celle du filage de la laine, celle de la façon d'apprendre
à écrire, celle de l'intimité avec le cheval, celle des moments de
veille du malade, celle de la rivière la Loue et des sensations du
corps dans l'eau, celle du moments des vendanges, celle des tournois
des chevaliers et la légende de la rose noire….
On tombe sous le charme de
ce magnifique « conte médiéval aussi singulier qu'envoûtant
où il est question de filiation, de solitude mais aussi d'amour et d'espoir (LIRE)
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