Russell Banks : Un moment permanent de la famille - Actes Sud, 2015 - nouvelles
« Ce qui m'intéresse dans une nouvelle, c'est l'instant précis où la vie du personnage bascule » dit l'auteur. Ainsi il nous écrit dans ce livre douze nouvelles aussi savoureuses et variées les unes que les autres, des moments d'intimité intense avec ses personnages. Ces nouvelles se passent du Nord de l’État de New York à la Floride, deux régions que l'auteur connaît parfaitement, habitant lui-même six mois d'un côté, six mois de l'autre.
L'auteur aborde les thèmes
récurrents que nous connaissons dans ses romans précédents (le
dernier étant «Lointain souvenir de la peau» paru en 2012, fiche
dans ce blog) : questions du divorce, des relations compliqués des
couples, des enfants qui s'éloignent, problèmes de santé, de
dépression, d'addiction à l'alcool ou aux drogues, descriptions des
milieux sociaux où règnent la misère, la solitude, le remord et de
situations difficiles dans lesquelles on perçoit le doute,
l'inquiétude, la tension.
Un ancien Marine fait un
braquage à main armé afin d' avoir de l'argent pour se soigner et
vivre... Un chien est tiraillé entre les maisons de deux divorcés
et l'on s'aperçoit que ce chien était le lien entre les membres de
cette famille désunie... Une femme noire se retrouve enfermée dans
une concession automobile, menacée par un chien méchant... Deux
nouvelles sont sur « les oiseaux des neiges » : ces
retraités qui quittent tout pour une autre vie : une veuve joyeuse
qui part habiter un appartement dans les barres d'immeubles de Miami
ou un vieux couple vivant dans un camping-car, tous après avoir vécu
dans les banlieues Nord de l’État de New York… Un artiste reçoit
une grosse somme d'une institution et va voir la soirée, où il
l'annonce à ses copains, se transformer en cauchemar... Un homme et
une femme qui ont failli avoir une relation des années plus tôt se
retrouvent « encombrés de leurs regrets »...
L'auteur ne juge pas ses
personnages mais simplement en fait des descriptions époustouflantes
de vérité : on les imagine tous immédiatement et on entre
dans leur intimité, leur secret, leur état psychologique du moment.
« L'art de raconter un destin en quelques traits », dit
François Busnel. On reste quelques fois un peu frustré de ne pas
savoir la suite de l'aventure….
« L'écriture est
tendue, acérée, suggestive » (la revue Lire). Le style est
épuré, précis. Certaines scènes sont tragi-comiques mais toutes
sont intenses, émouvantes, inattendues.
Voici donc « le
meilleur reportage sur la vie quotidienne des classes moyennes,
blanches et noires, en Amérique » : un excellent moment
de lecture.
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