Alice Zeniter : Sombre Dimanche - Albin Michel, 2013 - vient de paraitre en poche.
L'auteur
nous plonge dans le quotidien d'une famille hongroise habitant depuis
plusieurs générations la même maison en bois, posée au bord des
rails près d'une gare à Budapest. Nous sommes en Hongrie sur fond
d'occupation russe (40 ans) puis de fin de communisme.
Cette
famille n'est pas comme les autres : on la dirait maudite… Le
grand-père, son fils Pal et sa femme Ildiko, leurs deux enfants, Agi
et Imré vivent sous le même toit. Le récit progresse lentement en
suivant le cours du temps et nous allons suivre la vie d'Imre, gamin
timide dans les années 1980 puis adolescent mélancolique au moment
de l'ouverture des frontières en 1989. « La Hongrie post-URSS
s'américanise et le laisse perplexe ». L'auteur nous décrit
l'atmosphère lourde, les histoires dramatiques, les sentiments
tristes, les secrets que supportent cette famille qui a un destin
d'une noirceur totale. « Ils sont englués, écrasés par le
poids de l'Histoire et de l'occupation ». Ils se
recroquevillent sur leur passé douloureux. Les non-dits se dévoilent
avec parcimonie pour être confessés par le grand-père dans les
dernières pages.
Nous
suivons avec les personnages la chute du mur de Berlin et les espoirs
qu'elle soulève. L'Ouest fait rêver les héros du roman mais les
quelques joies et émancipations sont sans issue : Agi vivra
quelques temps avec un français, Imre fera connaissance d'une
allemande... « Même la découverte de l'amour et de la
sexualité, même l' amitié sont teintées de lâcheté et de
médiocrité ». Ces deux jeunes gens sont figés malgré les
événements : ils ne sont pas armés et prêts pour choisir une
autre vie.
Certes
ce livre est « sombre » mais quelle écriture et quel
talent possède l'auteur pour décrire les personnages, les
situations, les sentiments. Chaque ligne est écrite simplement, avec
peu de mots mais un style particulier et émouvant. L'auteur nous
décrit son pays tourmenté avec tendresse et réalisme.
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