Paul Auster : Chronique d'hiver - Actes Sud, 2012 - Documentaire littéraire.
Est-ce une autobiographie ? Un documentaire? Des Mémoires? Un recueil ? Les critiques sont unanimes pour dire que « Chronique d’hiver » est « une œuvre littéraire dont la forme est inédite ». En effet Paul Auster nous dit dans un entretien avec François Busnel (Revue Lire de mars 2013) : « Ce livre est composé de fragments autobiographiques avec la structure d’une œuvre musicale ». Ainsi Paul Auster choisit de nous raconter ses souvenirs sans chronologie. Les époques se chevauchent, s’en vont, reviennent selon des associations d’idées.C’est l’histoire d’un américain né après la guerre, de son enfance choyée, de sa jeunesse solitaire et nomade, étudiant « en quête de jouissance physique », de son séjour en France, de ses blessures physiques et morales, de sa passion pour le base-ball puis de l’adulte qui affronte des épreuves (mort prématurée de son père, mort soudaine de sa mère aimée dont il est incapable de faire le deuil jusqu’à ce livre), des joies (la rencontre en 1981 de son grand amour, la romancière Siri Hustvedt, la naissance de leur fille).
A tout âge, il reste un homme sensuel, en quête de sensations et pour qui le corps tient une place primordiale : « C’est toujours ton corps qui a repris à son compte le fardeau de tes batailles internes » écrit-il. Ce corps, qui, jeune, lui semblait invulnérable, commence, à 64 ans, être plus fragile et aborde « l’hiver de la vie ». Ce passage entre la jeunesse et le début de la vieillesse le hante : « C’est là dans ton corps que commence l’histoire et c’est aussi là, dans ton corps, que tout se terminera »….un peu trop mélancolique peut-être ???
Le seul passage
chronologique est la description de ses 21 logements, si bien écrit qu’on
imagine aisément l’auteur dans chaque lieu : un régal d’écriture.
Paul Auster emploie la
deuxième personne du singulier, ce « tu » nous le rend très proche.
Il voulait une « sorte de partage avec le lecteur ». « Le
« tu » implique le lecteur de façon très forte et lui permet de
repenser à sa vie à lui », dit-il. Il veut susciter en nous des réflexions
personnelles. Est-ce un pari réussi ? Je le pense. « Ma mission
d’écrivain, c’est de faire ressentir ce qu’est un être humain »…
C’est donc un
bouleversant récit personnel, honnête, sincère, réaliste, « sans
concession » et une belle leçon de vie. L’absence de cohérence est un peu
déroutante mais ce livre reste un véritable plaisir de lecture et un terrain de
réflexion personnelle.
Est-il utile de
rappeler que l’on peut relire avec toujours autant de plaisir la Trilogie
New-Yorkaise, Moon Palace et Leviathan (prix Médicis étranger 1993) en poche
ainsi que Sunset Park (Actes Sud 2011, Actes Sud poche Avril 2013).
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