Edouard Louis : Histoire de la violence - Ed. Seuil, 2016 - roman français
Edouard Louis nous
avait surpris avec son premier roman, il y a deux ans : « En finir
avec Eddy Bellegueule » qui était comme un récit autobiographique « coup de poing » tant il exprimait
la rage d’un gamin du Nord insulté, brutalisé, ridiculisé par son entourage en
découvrant son homosexualité.
Cette fois, nous
retrouvons son talent d’écrivain dans le récit d’un événement qui lui est
arrivé une nuit de Noël, événement qui tourne au tragique. Rentrant d’un diner,
il est abordé dans la rue à Paris par Reda, « un jeune kabyle au regard
enjôleur ». Ils se draguent, montent dans l’appartement de l’auteur, couchent
ensemble, discutent. Reda raconte sa vie, la vie de son père, l’arrivée en
France de celui-ci, le foyer d’accueil et les maintes humiliations successives
essuyées par cet étranger. Edouard parle peu. Soudain il se rend compte que
Reda lui a volé son téléphone et la rencontre dégénère. Reda « pétant un
plomb » devient d’une violence incroyable. Edouard sera battu, étranglé,
violé brutalement. Reda finira par partir en lui demandant pardon…On peut se
demander quelle est la raison de cette violence soudaine ? L’auteur
lui-même n’explique pas ce dérapage.
Voilà les faits mais il
y a la suite, les démarches médicales et judiciaires : va-t-il dénoncer Reda
qui ira en prison ? (souvenir d’une visite d’Edouard à un cousin en prison
dont il a gardé des images terribles). Va-t-il parler du vol ?
(passage sur les cambriolages qu’Edouard
a commis étant jeune.)
L’auteur ne parle que
de lui : c’est une étude du « moi » que nous lisons. Pas une
note d’humour, pas de descriptions d’autres personnages. « Ce récit brut,
douloureux à la construction maligne » dit un critique nous met mal à
l’aise. Le récit est sur trois niveaux : - Le narrateur qui est l’auteur
lui-même qui s’exprime dans un français littéraire. – La sœur de l’auteur Clara
qui raconte à son mari les faits dans son étonnant français de banlieue en y
ajoutant ses jugements pleins de bon sens. – Edouard écoute en se cachant le
récit de sa sœur et en fait des commentaires, mis entre parenthèses et écrits
en italique. Cela donne un texte compliqué sans chronologie mais ce sont les
couches de pensées et les arrières pensées qu’Edouard superpose.
Beaucoup de sujets sont
abordés : homophobie, racisme, crise sociale, souffrance. L’auteur a dit
lui-même qu’il était honteux et stressé de raconter cette tragédie (à
l’émission de LGL) : était-il utile de l’écrire ? Pour lui, sûrement,
mais était-il nécessaire de publier ce texte dérangeant, gênant. On peut
seulement admirer la façon d’écrire et conclure par cette critique de la revue
LIRE « c’est un livre riche, profond et terriblement puissant ».
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