Léonor de Récondo : Amours - Ed Sabine Wespieser, 2015 - roman
Léonor de Récondo mène
deux carrières : celle d'écrivain avec 4 romans dont Pietra
Viva (déjà analysé dans ce blog) qui évoque 6 mois de la vie de
Michel Ange et une carrière de violoniste : elle a cofondé en
2005 l'Yriade, un ensemble de musique de chambre baroque. A son
passage à la Grande Librairie, elle apparaît comme une jeune femme
lumineuse.
Ce roman « Amours »
se passe en 1908 en Touraine dans une maison de maître. C'est un
huis-clos d'une famille bourgeoise. Victoire, 24 ans, est mariée
depuis 5 ans à Anselme, plus âgé, notaire et notable et elle rêve
d'attendre un enfant mais elle se refuse à « l'enchevêtrement
immonde » qui donnerait un héritier au couple…
Leur vie bascule, le jour
où Céleste, 17 ans, qui fait partie du personnel de la maison,
tombe enceinte : Que vont décider les patrons de Céleste ?
Que va-t-il se passer dans cette maison tranquille. Victoire vivra
une révélation étonnante qui « balaie les normes sociales et
l'éducation données aux femmes à l'époque ».
L'auteur analyse à
merveille la tension qui va se créer entre les trois personnages et
qui va les mener dans des situations impossibles. Le caractère fort
de la jeune Céleste est magnifiquement senti : comment va
réagir cette jeune femme « humiliée, aimée, broyée » qui
se console en priant la Vierge Marie avec des phrases qui reviennent
comme une incantation. On admire le style et les phrases « bien
rythmées, ciselées et pures » et on ne peut oublier que notre
auteur est musicienne. Les détails de la vie du début du 20ème
siècle sont très précis : paysages, mobiliers et rideaux,
robes et corsets, repas et travail en cuisine. Il y a aussi de
superbes passages sur Victoire au piano.« Mille détails
construisent cette fiction intelligente, sensuelle et bien rythmée »
(LIRE)
Ce très beau livre évoque
le rapport à la maternité et ses obligations, le rôle du corps
des femmes au début du 20ème siècle où une idéologie de la haine
du corps faisait ravage et où la société cadenassée insistait sur
les différences sociales. : « le corps interdit de
plaisir, martyrisé dans des corsets, théorisé par l’Église pour
n'être que le réceptacle d'une vie à venir »
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