lundi 17 octobre 2022

Emmanuel Carrère : V13 (N°1 - oct 2022)

V13

 Emmanuel Carrère : V13 - Ed. P.O.L., 2022 - Chronique judicière


« C’est une œuvre pour l’Histoire. Ceux qui, dans 10, 20 ou 30 ans, voudront comprendre ce qui s’est passé ce funeste vendredi 13 se plongeront dans « V13 ». Emmanuel Carrère immortalise et sublime ce procès fou, suivi pendant 9 mois pour ‘ L’Obs’ ». (Match)

Mais il est important de se plonger maintenant dans cette chronique judiciaire, les faits étant encore dans nos mémoires, pour essayer d’appréhender le procès lui-même que l’auteur a suivi tous les jours de Septembre 2021 à Juin 2022. Il a écrit une chronique hebdomadaire pour l’Obs et maintenant, dans ce livre, il les a réunies et légèrement augmentées.

« V13 : c’est le nom de code du procès des attentats terroristes qui, le vendredi 13 novembre 2015, ont causé 130 morts au Stade de France, sur des terrasses de l’est parisiens, dans la salle de concert du Bataclan ».

L’auteur nous transmet son expérience « éprouvante, souvent bouleversante », les mois passés assis sur les bancs inconfortables dans l’immense « boîte » construite au cœur de l’ancien Palais de Justice de Paris. Nous rentrons avec lui dans les coulisses de ce procès historique : « une expérience unique d’effroi, de proximité et de présence » dit-il, puis « cela m’a passionné d’entendre décortiquer une cellule terroriste, même si les mecs dans le box étaient minables ». Il ajoute que « le procès a été exceptionnel avec des acteurs de la justice de très haut niveau ». Il relate sans juger mais non sans faire passer les émotions. Il arrive même à insérer quelques touches d’humour et ironise sur certains propos et situations, tout cela dans « sa prose élégante ».

Peut-être faut-il le lire une deuxième fois pour bien réaliser le fonctionnement de la justice : les plaidoiries des avocats, les verdicts, la parole des survivants, (l’écoute des paroles et des silences des 250 témoignages), les voix des terroristes quand ils veulent répondre.

Beaucoup de sincérité, de justesse et d’humanité.

Toni Morrison : Récitatif (N°2 - Oct 2022)

Toni Morrison : Récitatif - Ed Christian Bourgois - Nouvelle

Récitatif

Ce texte est l’unique et seule nouvelle jamais écrite par Toni Morrison, publiée en 1983 aux Etats-Unis, en 2019 en France dans la revue America et enfin cette année édité aux Editions Christian Bourgois. « C’est l’événement de la rentrée littéraire », disent certains médias.

Que dire de Toni Morrison ? Elle était romancière, essayiste, critique littéraire, dramaturge, professeure de littérature et éditrice américaine. Cette auteure afro-américaine fut lauréate du prix Nobel de littérature en 1993. Elle a publié 11 romans traduits en français dont Beloved, récompensé par le prix Pulitzer en 1988. Elle est décédée le 5 Août 2019. Elle s’est battue toute sa vie sur les questions raciales, la violence, la place des femmes dans la société. Tous ces thèmes sont abordés dans cette nouvelle qui raconte l’amitié entre deux enfants qui se rencontrent dans un foyer puis se recroisent par hasard une fois devenues des femmes et vivant dans des conditions de vie totalement différentes : « Chacune lutte pour affirmer son identité ».

Je ne dévoile pas l’énigme contenue dans cette nouvelle, énigme étudiée dans la postface passionnante écrite par Zadie Smith.

« Récitatif nous offre la quintessence d’une des voix les plus inoubliables de la littérature américaine contemporaine » nous écrit l’éditeur.

Jean Teulé : Azincourt par temps de pluie (N°3 - oct 2022)

Azincourt par temps de pluie

Jean Teulé : Azincourt par temps de pluie - 


Ayant déjà lu plusieurs romans de Jean Teulé, aimant sa façon piquante et humoristique de présenter les événements ou les personnages comme « Crénom, Baudelaire », j’étais intéressée de lire son « Azincourt par temps de pluie », cette fameuse bataille désastreuse pour la France qui eut lieu le 25 octobre 1415 dans les plaines autour de ce village du nord de la France, en Artois. ce fut la dernière bataille de la guerre de Cent-Ans.

Henri V, jeune monarque anglais, décide de rentrer tranquillement en Grande-Bretagne en battant retraite vers Calais, ville anglaise à cette époque avec quelques milliers de soldats, ayant été mis en déroute par les Français près de Harfleur mais ces anglais se retrouvent pris au piège par l’armée française au nombre de 30.000, « bottés, casqués, cuirassés, armés jusqu’aux dents » : ce fut sanglant, « un splendide affrontement médiéval »… Aucun chevalier français n’en sortira vivant. C’est un désastre, « une déculottée », une absurdité qui pourtant ne dura que trois jours, les français si nombreux étant englués dans la boue due à une pluie incessante, coincés dans leurs armures, tous ayant fait la veille une fête mémorable, un festin pantagruélique, exagérément arrosé de boissons alcoolisées : « Azincourt par soirée de bamboche »…

On connait la verve, l’humour, le sens du détail de l’auteur mais ici cela devient de la grossièreté avec des mots très crus, des descriptions d’une boucherie écœurante avec corps mutilés, franchissement de chair humaine et chevaline etc…jusque la dernière ligne triviale…

Assez décevant…bien que très bien documenté.

Toujours est-il que cette bataille mémorable eut bien lieu autour du village d’ Azincourt où une exposition permanente est visitable : « Le centre « Azincourt 1415 » est un centre d’interprétation historique ayant pour mission de valoriser et entretenir la mémoire de la bataille d’Azincourt  mais aussi de témoigner auprès des générations futures de l’héritage historique et culturel que nous a laissé la guerre de Cent-Ans, conflit qui déchire les royaumes de France et d’Angleterre de 1337 à 1453 »