Tiffany McDaniel : Betty - Gallmeister, 2020 - roman américain
Betty est le nom de la mère de l’auteure dont elle raconte la vie à la première personne. Elle écrit en dédicace : « je t’aime, maman. Ce livre est pour toi et toute ta magie immémoriale » : émouvant donc dès les premières lignes…
Ce roman n’est pas une autobiographie mais une fiction puisque l’auteur ajoute à la vie de Betty, sa mère, et à sa grande famille Carpenter, des personnages fictifs comme une femme masquée étrange, un homme qui transporte un parpaing partout où il va et des légendes et rites amérindiens.
Betty Carpenter est une métisse cherokee « avec son teint mat et ses cheveux noirs d’Amérindienne » au visage doux et volontaire tel le portrait de Betty enfant que l’on voit en première page. Elle a vu le jour en 1954 « dans une baignoire vide à pieds de griffon ». Elle est la sixième d’une fratrie de 8 enfants et grandit dans une maison en ruine, dans une bourgade imaginaire de l’Ohio, que la famille considère comme un palais. Les Carpenter tentent de trouver une place dans cette communauté, composant entre la nature bienveillante et le racisme hostile des habitants de ce village.
L’auteure débute le roman en 1909 lorsque le père de Betty nait et se termine en 1973 à sa mort, alors que Betty vient de fêter ses 19 ans et change de vie…
Betty grandit entre son merveilleux père cherokee dont elle est inséparable, sa mère blanche poignante et instable (on comprendra pourquoi…) et ses frères et sœurs, surtout ses deux sœurs dont elle est très complice : Flossy la vaniteuse et la délurée et Fraya la mystérieuse et la lumineuse. (On comprend ici ce que veut dire le mot « sororité »). Leur langage commun, leurs rituels, leurs jeux, leurs petits messages de « bonne nuit » gardés dans des bocaux sont touchants et montrent leur lien indéfectible.
Betty, la Petite Indienne, grandit heureuse (sauf à l’école) bercée par l’éducation que lui donne son père « abîmé par le travail et les humiliations » d’une dignité sublime, d’une bonté sans limites, essayant de transmettre son amour de la nature, sa façon d’écouter la terre, de protéger la faune et la flore, de s’en servir pour guérir les maux donc écologiste avant l’heure, botaniste, fabuliste, guérisseur, ébéniste…. « Il rend sa fille fière de ses origines, consciente de la puissance de sa lignée » (le Monde).
Notre Betty va être confrontée à la dure réalité du monde et l’innocence lui est soudainement arrachée. Elle réagit avec courage aux drames et aux deuils qui frappent la famille et montre une force incroyable qu’elle puise dans la nature, dans une sorte de foi en la vie et dans l’écriture. « De cette famille blessée, socialement, intimement, Betty est la force, la mémoire, autant que l’avenir ». (la Croix)
« Cette fresque familiale est d’une grande puissance », « un roman troublant et envoûtant », « un roman d’apprentissage féministe, spirituel, magnifique », « d’une beauté à pleurer » : Ainsi est qualifié ce long récit dont le lecteur garde en tête longtemps les magnifiques personnages et avale sans s’en rendre compte les 700 pages.