Eric Vuillard : L'ordre du jour - 2017, Actes Sud - roman français.
Eric Vuillard a reçu le
Prix Goncourt 2017 pour ce livre « L’ordre du jour », prix
inattendu : l’auteur fut lui-même surpris en disant que son livre n’est
pas un roman mais un récit « ni vraiment de la fiction, ni tout à fait un
essai », qu’il est très court, qu’il est paru en mai et non au moment de
la traditionnelle rentrée littéraire de septembre…
Toujours est-il que
l’on comprend les jurés de ce grand prix tant ce livre est percutant,
« scotchant », incroyable : « La démonstration d’Eric
Vuillard est limpide, cinglante, implacable » (Télérama)
Eric Vuillard est
un «écrivain passé maître dans l’art de
démystifier grâce à la littérature, des faits historiques » (à lire « 14
juillet », paru en 2016 sur la prise de la Bastille). Il aime écrire sur
les coulisses de l’histoire. Ici il nous raconte l’arrivée au pouvoir des
nazis.
Partant d’une réunion
qui a lieu le 20 février 1933 où 24 grands industriels allemands acceptent de
donner des sommes incroyables pour financer le parti national socialiste et
pour leur profit, il décrit l’arrivée au pouvoir d’Hitler et l’Anschluss
(l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne nazie). Nous sommes plongés dans
l’atmosphère de l’époque dans les moindres détails, partant quelque fois d’une
anecdote qui pourrait paraître anodine. La soirée de Ribbentrop à Londres,
invité par Chamberlain, est un régal de lecture. Cette scène est hallucinante
et on sent bien que l’auteur écrit dans la « jubilation » (il le
dit lui-même). Puis la bourde du
chancelier d’Autriche disant à Hitler que Beethoven est autrichien. Puis
« l’embouteillage des blindés obsolètes » : on finit par se
demander si tout cela est vrai tant cela parait « fou ».
Le président de
l’académie Goncourt, Bernard Pivot, a reconnu avoir été impressionné par ce
texte d’une écriture à la fois simple et sidérante : « Le livre est
une leçon de littérature par son écriture et une leçon de morale
politique ».