Gaël Faye : Petit pays - Grasset - 2016 - roman autobiographique
Lauréat du prix du
roman Fnac en début d’automne, faisant partie de la première sélection pour le Goncourt et maintenant Prix
Goncourt des Lycéens, Petit Pays est l’une des découvertes de la rentrée. Gaël Faye
est un franco-rwandais, exilé en France depuis 1995, devenu trader à Londres
(où il menait « une vie de poisson rouge »…) puis rappeur-slameur en France.
La première partie du roman (sûrement autobiographique) décrit le quotidien insouciant d’un petit garçon métis
(père français, mère rwandaise) au Burundi. Il mène une vie tranquille et
heureuse vers la fin des années 1990 avec belle maison, domestique, copains. Que
de belles images de cette enfance : le goût des mangues, la lumière
aveuglante, la musique, les senteurs des fleurs, les jeux d’enfants puis de
pré-ados. Mais cette insouciance est apparente car il connait les difficultés que sa maman a rencontrées. il nous écrit ce très beau passage : « Les voisins étaient surtout des Rwandais qui avaient
quitté leur pays pour échapper aux tueries, massacres, guerres, pogroms,
épurations, destructions, incendies, mouches tsé-tsé, apartheids, viols, meurtres,
règlements de compte et que sais-je encore. Comme Maman, ils avaient fui ces
problèmes et en avaient rencontrés de nouveaux au Burundi – pauvreté,
exclusion, quotas, xénophobie, rejet, boucs émissaires, dépression, mal du
pays, nostalgie. Des problèmes de réfugiés. »
La séparation de ses
parents sera la première ombre et la fin de l’innocence. Commence alors la
deuxième partie du roman : l’enfant devient adulte. L’auteur écrit avec
puissance et émotion ce franchissement entre les deux mondes. A la même époque ont lieu
les massacres entre Hutus et Tutsis. La famille de sa mère sera victime du
génocide Tutsis au Rwanda en 1994. L’auteur « parvient à trouver les mots
pour l’indicible, à travers le témoignage de sa mère, au cours d’une scène
nocturne et douloureuse, sur l’assassinat de ses nièces » (Match)
« A la voix du
petit garçon, se mêle celle de l’homme qu’il est devenu 20 ans plus tard ».
Il nous dit lorsqu’il retourne dans son pays : « Je pensais être
exilé de mon pays. En revenant sur les traces de mon passé, j’ai compris que je
l’étais de mon enfance. Ce qui me parait bien plus cruel encore ». Le
dernier chapitre est le point sublime de ce roman…très émouvant.
Beaucoup de sujets
abordés dans ce roman puissant et dense : l’identité, la peur, le passage
d’un enfant à l’âge adulte, le racisme en Afrique, les rapports entre les
expatriés et les Africains, les exilés, les réfugiés.